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Survie Midi Pyrénées

Côte d’Ivoire : la France pyromane ne doit pas jouer au pompier

2 Janvier 2011 , Rédigé par survie.midipyrenees@free.fr Publié dans #Actualités françafricaines, communiqués, archives.

Communiqué de Survie, 23/12/2010


Côte d’Ivoire : la France pyromane ne doit pas jouer au pompier



L’association Survie rappelle que la France porte une grande responsabilité dans la crise qui secoue la Côte d’Ivoire depuis 8 ans. Malgré ce que prétendent l’ONU et les puissances occidentales, les conditions n’étaient pas réunies pour éviter une large fraude, particulièrement au Nord du pays. La seule issue semble désormais l’apaisement entre les deux camps et non l’affirmation de la victoire de l’un sur l’autre. La France doit procéder au retrait de son opération militaire au profit de troupes internationales sous commandement onusien.


Pour la première fois de leur histoire, les citoyens ivoiriens ont voté dans une élection présidentielle véritablement pluraliste et ouverte. Malgré des conditions extrêmement défavorables, la participation fut massive. Mais depuis trois semaines, la Côte d’Ivoire est séquestrée par « deux présidents ». Tandis que l’un, Laurent Gbagbo, se crispe sur son pouvoir, la « communauté internationale » est en passe d’imposer l’autre,Alassane Ouattara, aux Ivoiriens.
Pour cerner l’immense responsabilité de la diplomatie française dans l’impasse que vit actuellement la Côte d’Ivoire, il est nécessaire de poser quelques jalons historiques.


À l’automne 2002, l’Élysée refuse l’application des accords de défense à une Côte d’Ivoire en proie à une rébellion armée approvisionnée par un pays voisin. Au contraire, un cessez-le-feu est imposé, entérinant la partition du pays.


En janvier 2003, lors des accords de Marcoussis, la diplomatie française impose l’entrée des rebelles dans le gouvernement ivoirien. À Abidjan, des manifestants refusent que les portefeuilles de la Défense et de l’Intérieur soient confiés aux rebelles, comme le prévoyait l’exécutif français.


En novembre 2004, un engrenage tourne au drame. Au cours d’une offensive aérienne de l’armée ivoirienne sur les zones rebelles, neuf soldats français de l’opération Licorne et un civil américain trouvent la mort. Craignant un putsch orchestré par l’armée française après qu’elle a détruit l’aviation militaire ivoirienne, des manifestants envahissent certains quartiers d’Abidjan.L’armée française tire sur des manifestants, faisant plus de soixante morts.


Les accords de Pretoria d’avril 2005 calquent la structure de la Commission Électorale Indépendante (CEI) sur le plan de table des négociations de Marcoussis, aboutissant à une surreprésentation des rebelles, assurant aux partis d’opposition une large majorité [1]. Dans la foulée, le Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP) est créé à Paris, réconciliant deux anciens ennemis [2], Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara, autour d’un accord électoral destiné à assurer la victoire de l’un des deux sur Laurent Gbagbo. L’Union Européenne impulse, à travers les Nations Unies, un Programme d’Appui aux Processus Électoraux dont la CEI est le principal bénéficiaire. Le descriptif de ce programme [3] laissait déjà augurer un passage en force :
« Pour les prochaines échéances électorales, il est à prévoir que le problème de confiance se posera avec une acuité encore plus grande et exigera le recours à des pouvoirs décisionnels exceptionnels pour contrecarrer l’incapacité d’atteindre des consensus politiques en temps utile. »


Début 2007, depuis Ouagadougou, Michel de Bonnecorse, chef de la cellule africaine de l’Élysée sous Jacques Chirac, annonce que la fin de la rébellion n’est pas un préalable aux élections [4]. Quelques semaines plus tard, Laurent Gbagbo, Guillaume Soro, leader de la rébellion, et Blaise Compaoré, président du Burkina, signent les accords de Ouagadougou : Guillaume Soro devient premier ministre. Fin 2007, un accord complémentaire a pour unique objet de confier à la société française Sagem Sécurité le volet technique de l’élaboration des listes électorales [5].


Ce 2 décembre 2010, le Conseil Constitutionnel ivoirien, essentiellement favorable à Laurent Gbagbo, constate l’expiration du délai imparti à la CEI pour annoncer les résultats provisoires. En effet, la CEI a échoué à trouver un consensus sur l’ampleur d’irrégularités dans le scrutin. Le président de la CEI Youssouf Bakayoko se rend alors au Golf Hôtel, où se trouvent déjà Henri Konan Bédié, Alassane Ouattara, Guillaume Soro, le représentant du secrétaire général de l’ONU et les ambassadeurs français et américain. Ces derniers lui promettent protection jusqu’à l’aéroport, en échange de la proclamation de résultats. Bakayoko annonce la victoire de Alassane Ouattara devant les caméras occidentales. Le lendemain, le Conseil Constitutionnel annonce l’invalidation du scrutin dans sept départements de la zone contrôlée par les rebelles et la victoire de Laurent Gbagbo.

 

Pays déchiré, par Noémi, thepot

Prétendre organiser une élection satisfaisante sans mettre fin à la partition du pays [6] était absurde. On s’étonne qu’aucune autorité internationale ne l’ait exigé sérieusement. Malgré les énormes moyens mis en œuvre, le scrutin n’a pas offert les garanties brandies par l’ONU.
Croire que l’élection présidentielle sortirait la Côte d’Ivoire de la crise était un leurre. Aucun des candidats du second tour ne sera capable à lui seul de guérir la société ivoirienne de ses plaies. Ni Alassane Ouattara, l’économiste libéral qui a fait carrière dans les grandes institutions financières internationales, l’adepte des privatisations, des coupes dans les budgets sociaux et autres plans d’ajustement structurel, l’ami très apprécié de l’Élysée. Ni Laurent Gbagbo, le socialiste devenu rapidement allié des grands groupes français, le nationaliste souvent - et sans doute volontairement - ambigu.


Il est urgent que les initiatives d’apaisement soient privilégiées [7]. Si la « communauté internationale » a une once de bon sens, c’est dans cette voie qu’elle doit pousser les acteurs de cette crise et non dans le refus de voir la réalité et dans l’illusion qu’on peut imposer une solution de force à un pays divisé. Le risque est de plonger la Côte d’Ivoire dans la violence.


Nous demandons que tout soit fait, à commencer par le retrait de l’opération Licorne au profit d’un renforcement de l’ONUCI, pour la réconciliation des Ivoiriens et non pour assurer la victoire d’un camp sur l’autre, ce qui serait lourd de menaces pour l’avenir de la Côte d’Ivoire.


Contact presse :
Stéphanie Dubois de Prisque - Chargée de communication
stephanie.duboisdeprisque(a)survie.org
01 44 61 03 25
06 89 31 17 18
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 Rawlings préconise une approche pacifique à la crise ivoirienne

par Nicole Bancouly, Notre Voie
L’ancien président ghanéen, Jerry John Rawlings, a réitéré son appel pour une retenue extrême dans la gestion de la crise en Côte d'Ivoire. Dans un message publié jeudi, trois jours après qu'il a réclamé de la retenue et de la maturité de la part de tous les acteurs de la crise, le Président Rawlings a dit que la situation en Côte d' Ivoire n'était pas un simple conflit électoral, mais un enchevêtrement des complexités ethniques et politiques qui devaient être gérées avec tact et diplomatie plutôt que par des allusions ouvertes à l’usage de la force. L'ancien Président a déclaré que les résultats contestés indiquent clairement que la Côte d'Ivoire est abruptement divisée en lignes ethniques, fait dont devrait se préoccuper les parties prenantes telles que la CEDEAO, l'UA et l'ONU au moment où elles étudient des options pour résoudre l'impasse.

“Les deux hommes au centre du conflit ont indiqué leur volonté d’accepter un recompte ou une revérification des résultats par des observateurs neutres. Y a-t-il une raison cachée à ne pas vouloir accepter l’offre faite par les deux parties ?
Il est également important que nous ne nous précipitions pas dans aucune forme d'intervention de force. Cela ne garantira pas une résolution définitive de la crise et peut au contraire exacerber une situation déjà volatile qui pourrait résulter en une guerre civile complète avec des effets désastreux sur les populations de toute la sous-région.
Les tentatives de recueillir du soutien pour une intervention militaire ne sont pas fondées et exposeront plutôt l’hypocrisie de l'ONU, la CEDEAO et l'UA.
Des résultats d'élection plus outrageants ont eu lieu sans intervention. Comment pouvons-nous justifier une intervention dans ce cas, quand les résultats sont si serrés et divisés selon des lignes ethniques ? Laissez-nous étudier toutes les options de paix disponibles plutôt qu'une intervention militaire, qui ne peut pas aboutir à une transition politique pacifique en Côte d'Ivoire.
La situation est certainement embarrassante pour l’Afrique, mais tout aussi inquiétant est le fait que les médias internationaux ont fait l’impasse sur beaucoup d’éléments. Des rapports de certains principaux observateurs des élections condamnant la conduite des élections dans plusieurs parties du pays ont été totalement ignorés par les médias internationaux. Dans certaines régions, le nombre de suffrages exprimés est plus élevé que le nombre total de votants. Dans une région, il y a 159.788 suffrages exprimés pour 48.400 votants. Ceci, additionné au fait que dans certaines régions, le personnel de la commission électorale et certains agents électoraux n'ont pas été autorisés à contrôler le processus, appelle à ce qu’une enquête appropriée soit instamment diligentée. Il y a tant de questions cruciales sans réponse. Les détails du rapport de l’envoyé de l’Union africaine, le Président Thabo Mbeki, devraient être rendus publics pour aider à mieux comprendre la nature de la situation.
Il est également impératif que la CEDEAO convoque une réunion d’urgence pour inviter les deux parties au centre de la crise ainsi que des représentants de toutes les missions d'observation qui ont couvert les élections à présenter leur cas. C'est ce qui a été fait par le passé et cela nous fera avancer d’un grand pas dans la recherche de la solution.
Nous devons agir avec précaution pour le bien des populations de Côte d'Ivoire qui sont les vraies victimes de cette tragédie. J'invite la CEDEAO et les autres institutions internationales impliquées dans la crise à analyser la situation avec la plus grande attention et à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour la résoudre d'une façon pacifique», a dit le Président Rawlings.

 

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